Romans policiers
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 Le mystère de la falaise - par Charlie 76

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Georgina
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Georgina


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MessageSujet: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMer 25 Jan 2012 - 20:23

Lorsque la femme de son ami d'enfance est retrouvée morte, Greg pense, comme tout le monde, qu'elle a mis fin à ses jours. Certes, Marie était une épouse heureuse, une brillante avocate et une maman comblée mais c’était avant tout une femme qui ne supportait plus d’être clouée dans un fauteuil roulant.

Que s'est-il réellement passé au cours de cette soirée entre amis où le corps de Marie est retrouvé sans vie au pied de la falaise ? Greg, rattrapé par son passé d'ancien flic, va devoir affronter ses propres démons dans l’une des enquêtes les plus difficiles de sa carrière, où petits mensonges et sombres secrets le mèneront à la terrible vérité"



Dernière édition par Georgina le Mer 25 Jan 2012 - 20:32, édité 1 fois
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Georgina
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MessageSujet: Re: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMer 25 Jan 2012 - 20:25

Chapitre I

Le bruit de la sonnette me sortit du pseudo coma dans lequel j’étais plongé. Quelle heure pouvait-il bien être ? Bon sang, il fallait que je dorme encore un peu. J’avais passé une partie de la nuit à bosser et j’aurais donné n’importe quoi pour quelques secondes de sommeil supplémentaire.
Je me tournai dans le lit qui me semblait tout d’un coup immense. Laure passait la semaine en bord de mer pour un séminaire de psychiatrie dont j’avais oublié le thème exact. Pendant que ma belle, entre deux conférences, se pavanait au bord de la piscine de l’hôtel, j’avais essayé d’avancer sur mon projet du moment. Mais même en planchant jusqu’à 4h du matin, l’inspiration m’avait manqué et je restais peu convaincu du résultat. Pourtant, je n’avais pas vraiment le choix, je voyais mon éditeur ce soir, et il fallait absolument que je lui donne quelque chose à se mettre sous la dent. Je devais être convaincant. Il allait certainement vouloir que je continue cette satanée biographie. Tu parles, avec les événements du mois passé, c’était le succès garanti, mon bouquin se vendrait comme des petits pains. Pourtant, j’étais contre le fait que mon projet se transforme en torchon racoleur que les curieux et les adeptes de magazines à potins allaient s’arracher. C’était contraire à ce qu’écrire représentait pour moi. Et puis je ne voulais pas remuer toute cette histoire. Je savais que ce serait douloureux pour Alan et même si notre amitié était déjà entachée par de vieux démons, il était hors de question qu’il souffre d’avantage. Richard, mon éditeur, allait devoir se contenter d’une proposition dans la lignée de ce que j’aimais faire, même s’il faut avouer que les adeptes de mon style n’étaient plus très nombreux depuis quelques temps.
La sonnette retentit de nouveau. Mon visiteur n’avait apparemment pas l’intention de me laisser poursuivre ma nuit. Il avait abandonné la manière douce et tapait maintenant du poing sur la porte. Je finis par m’extirper de sous la couette à contrecœur.
Six mois plus tard, j’enfilai un boxer qui traînait au pied du lit et traversai l’appartement pour aller voir.
Je jette un coup d’œil à travers le judas et vois Sam qui trépigne derrière la porte. J’ouvre lentement et je sens dans son regard un brin de culpabilité en voyant ma tête déconfite.
- Salut Sam, lançai-je. Tu sais qu’il n’est même pas 7h, ce n’est pas une heure pour boire une bière.
- Salut Greg, un p’tit café suffira. Dis-moi merci, je te sauve d’une affreuse grasse matinée .
- J’espère que tu as une bonne raison pour venir me réveiller à cette heure-là.
- Va t’habiller, je fais chauffer le café.
Samuel me connaissait par cœur, il savait que je ne serais pas en état de parler avant un bon café.
L’appartement ressemblait à un capharnaüm, je n’avais pas débarrassé la table hier soir, mon assiette était encore là et la vaisselle s’entassait depuis que Laure était partie. Mon PC était resté allumé sur la table basse et deux canettes de bière vides traînaient sur la moquette. On aurait dit un appartement de vieux célibataire. J’avais intérêt à mettre un peu d’ordre avant le retour de Laure. Sam ne vit sans doute pas le désordre, il sifflotait en s’occupant du café.
Je l’avais connu à ma sortie de l’école de police il y a quatorze ans. J’avais commencé dans la même équipe que lui et nous avions immédiatement accroché. Il avait dix ans de plus que moi mais on se ressemblait : fonceurs et pleins d’ambition. Il était flic à la PJ depuis onze ans quand j’étais rentré et il m’avait beaucoup appris lors de mes débuts sur le terrain. En tant que co-équipiers, on se débrouillait plutôt pas mal, on se complétait : Sam était grande gueule alors que je savais être plus diplomate. Il était blond, petit et mince alors que j’étais très brun, plutôt grand et carré d’épaules. Je n’avais pas un physique d’athlète mais à côté de lui, je paraissais bien bâti. Pourtant, il ne fallait pas se fier aux apparences car si j’étais plutôt calme et pacifiste, Sam était nerveux et toujours prêt à mettre une droite. Il était d’ailleurs beaucoup plus sportif que moi. Je crois qu’on faisait un duo de choc à l’époque. En tout cas, nous avions tous les deux le même but : rendre la justice. Mais tout cela était loin et j’évitais d’y penser depuis que j’avais quitté la police.
Je sautai dans mon jean qui devait être sale depuis le temps que je le traînais. Je vins m’asseoir dans le canapé à côté de Sam et bus une gorgée de café bien chaud auquel j’avais ajouté deux sucres. Cela me donna un coup de fouet et j’eus l’impression d’être déjà plus alerte. Je regardai Sam qui cherchait dans mon regard le feu vert pour déblatérer son histoire.
- Greg, je suis sur une affaire délicate, j’ai besoin de ton avis.
- T’es quand même pas venu me réveiller à cette heure-là pour me parler boulot ? On avait conclu un arrangement, on ne parlait plus de tout ça.
- Je sais mais cette fois, c’est important.
- Mais c’est toujours important avec toi !
- S’il te plait Greg, je te demande juste de m’écouter.
J’allai chercher mon paquet de cigarettes, j’étais déjà tendu à l’idée de la discussion qui allait suivre.
- OK, lançai-je, je t’écoute.
Il marqua un temps d’arrêt.
- Greg, où en est ton bouquin ?
- Mon bouquin ? La biographie d’Alan tu veux dire ? Qu’est-ce que ça vient faire là-dedans ?
- Oui, la biographie d’Alan Moss, où en es-tu ?
- Oh là Sam, je ne te suis pas là, depuis quand mes livres t’intéressent ?
- Depuis que j’enquête sur la mort de Marie Moss.
Je n’en croyais pas mes oreilles, je ne savais pas exactement où Sam voulait en venir mais ça sentait le roussi.
Je me resservis une tasse de café et me mis à touiller sans lever la tête.
- Quelle enquête ? Marie s’est suicidée.
- Ouais, disons que c’est la conclusion provisoire. A première vue, tout porte à croire que c’est un suicide mais je suis persuadé qu’il y a autre chose. C’est Bellon qui a interrogé les invités ce soir-là, mais tu le sais déjà puisque tu étais sur place. A six mois de la retraite, je ne pense pas qu’il se soit foulé. Deux témoignages comme quoi la victime est dépressive et il conclut au suicide. Ça arrange tout le monde. J’ai été chargé de valider le dossier avant de le clôturer mais ça me titille. Si tous les gens un peu dépressifs se suicidaient, les psys feraient faillite. Et puis y’a plus simple pour se foutre en l’air, les femmes s’avalent une boite de cachetons, elles n’ont en général pas les tripes pour se jeter d’une falaise.
- Bon sang Sam, depuis quand t’es un expert en psychologie toi ? Marie était clouée dans un fauteuil roulant, elle était mariée à un séducteur de première qui n’était jamais là. Y’avait de quoi se morfondre. Elle avait des phases de déprime très importantes. Laure m’a souvent dit que c’était sérieux. Qu’est-ce que tu veux de plus ?
- C’était une battante. Son handicap ne l’a pas empêchée de faire une brillante carrière, elle était en pleine ascension professionnelle. Ça te parait normal qu’elle craque maintenant alors qu’elle est renommée et qu’elle a une gosse de cinq ans ? Quand à Alan, certes, il a un passé de tombeur, mais tu as dit toi-même qu’il avait l’air d’avoir changé.
- Mais bon sang tu sais bien que ce n’est jamais aussi simple que ça y parait.
- Justement, la thèse de la pauvre femme handicapée et désespérée me semble trop facile. Sa villa est bourrée d’amis qu’elle a conviés mais elle décide d’aller se jeter dans le vide entre deux coupes de champagnes, ben voyons !
- Et tu penses à quoi? A un meurtre ?
- Oui, parfaitement, à un meurtre. Le problème, c’est que Marionni ne veut pas en entendre parler, tu penses bien, le mari est célèbre, il ne veut pas faire de vagues. J’ai besoin de toi sur ce coup. Je veux que tu m’aides à trouver ce qui s’est passé. Tu bosses sur la biographie d’Alan, tu pourras poser des questions sans que cela paraisse suspect.
Je bouillonnais.
- Sam, tu sais bien que c’est fini tout ça ! Les enquêtes, Marionni, je ne veux plus en entendre parler. Pourquoi tu remues le passé ? On avait dit qu’on ne remettrait jamais ça sur le tapis !
- Non Greg, au fond de toi, je suis sûr que ce n’est pas fini. Putain, t’étais un bon flic, t’as ça dans les tripes ! Tu vas pas finir tes jours enfermé chez toi à écrire. Galérer pendant des mois pour arriver à vendre trois cents bouquins et…
Je le coupai net.
- Stop, ne dis rien que tu pourrais regretter.
Je me levai furax. Sam savait que le sujet était clos, j’avais quitté la police et tout cela était derrière moi. Je m’approchai de la fenêtre. Le salon donnait sur la rue, je regardai au loin en essayant de faire le vide pour me calmer.
- De toute façon y’a plus de biographie. Je ne la finirai pas. Ce ne serait plus les mémoires d’Alan Moss après ce qu’il vient de se passer, ça deviendrait un bouquin à sensations sur la mort de Marie !
Sam vit qu’il ne fallait pas insister d’avantage. Il se leva et murmura avant de partir.
- Ok, Greg, on en parle plus. Je t’appelle.
J’entendis la porte se refermer derrière lui.
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MessageSujet: Re: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMer 25 Jan 2012 - 20:29

Chapitre 2 :


- Et tu crois que je vais laisser tomber comme ça ?
Richard me dévisageait, je lisais dans ses yeux colère et déception.
- Mais enfin tu réalises ? poursuivit-il, tu as un sujet en or sur lequel tu as déjà bien avancé et tu veux tout arrêter !
La nuit commençait à tomber et le bar se remplissait peu à peu. Nous étions installés à notre table préférée près de la fenêtre. Je scrutais la rue, sans vraiment voir le défilé des passants, fatigué par la négociation avec Richard. Cela faisait plus d’une heure que l’on se renvoyait la balle et ni lui ni moi n’étions prêts à caler. Il me regardait derrière ses lunettes, avec son air sérieux habituel. Il portait comme toujours un costume et une cravate. Je crois qu’il s’habillait comme ça pour se donner une certaine contenance. La vendeuse avait dû lui conseiller ce modèle classe et branché, mais il restait malgré cela très banal, le genre de personne auquel on ne fait pas vraiment attention.
Je fis signe au serveur de m’apporter une autre bière. Richard, pris dans le feu de la conversation, n’avait même pas entamé son whisky.
Il avait raison, j’avais un sujet en or. Cela faisait sept mois que je travaillais sur la biographie d’Alan et les médias attendaient déjà sa sortie comme une perle rare.
Il faut dire qu’Alan est très convoité. Mystérieux, c’est sans doute ce qui le rend si apprécié du public. Particulièrement discret, ses apparitions dans les médias sont rares donc extrêmement prisées. Il a le don d’exaspérer les producteurs en refusant systématiquement les interviews lors de la sortie d’un de ses films.
Bel homme, brun ténébreux au regard sombre, il parle peu mais quand il ouvre la bouche, il dégage un charisme impressionnant dont il a fait son principal atout. A l’aube de la quarantaine, il est au sommet de sa carrière professionnelle. Acteur reconnu, Il tourne régulièrement, gagne bien sa vie et se permet même de refuser beaucoup de scenarii qui ne lui correspondent pas. Beaucoup pensent qu’il fait du zèle mais je crois plutôt qu’il reste fidèle à ses convictions.
Je sentais Richard qui bouillait d’impatience en face de moi.
- Tu sais bien que le racolage, ce n’est pas mon truc Richard. Les gens vont vouloir du sensationnel, du détail croustillant, je ne veux pas faire ça.
- Mais je ne te demande pas de faire le paparazzi. Reste toi-même, fais-le à ta façon, au contraire. Tu sais bien que je te donne carte blanche mais ne lâche pas tout de suite, je t’en prie.
J’avais préparé mes arguments mais Richard était têtu et je savais qu’il n’abandonnerait pas comme ça.
- De toute façon, Alan, ne voudra pas continuer, je sais comment il fonctionne. Depuis la mort de Marie, il n’a accordé aucune interview. Il ne voudra pas étaler cette histoire au grand jour et je le comprends. Ce serait trop douloureux pour lui de remuer tout cela.
- Justement, avec toi ce sera différent Greg, tu n’es pas un journaliste à la recherche du scoop. Vous êtes amis. La preuve, il a accepté que tu travailles sur sa biographie alors qu’il refuse des dizaines de projets de ce genre chaque mois. Il te fait confiance. Il aura peut-être envie de parler de sa femme, de lui rendre hommage.
- Lui rendre hommage, tu parles, murmurai-je.
Le fait que Richard évoque l’amitié qui me liait à Alan me faisait sourire intérieurement.
Effectivement, nous avions été amis, mais c’était il y a si longtemps. Je me demandais encore pourquoi il avait accepté que j’écrive sa biographie. Je ne savais pas vraiment. Je suppose qu’il se sentait redevable vis-à-vis de moi.
Je le connaissais depuis toujours. Son prénom de baptême était en fait Alain, mais Moss était bien son vrai nom. Son père était d’origine américaine.
Ma mère habitait dans le même quartier que ses parents lorsque nous étions enfants. Nous allions à la même école et nous jouions souvent ensemble après la classe.
Ses parents étaient aisés et quand Alan a eu onze ans, ils ont déménagé dans un quartier plus huppé mais nous avons gardé contact. Enfants, nous étions toujours ensemble pour faire les quatre cents coups. Nous avons toussé notre première cigarette ensemble, cachés derrière un muret et je me souviens encore du goût infâme de la première bière qu’on s’était enfilé, un truc bon marché acheté à l’épicerie du coin. On se sentait des hommes.
Vint ensuite le temps des sorties en club. Les parents d’Alan lui ont payé le permis et une voiture dès qu’il en a eu l’âge et je n’étais pas peu fier de monter à bord. Alan avait très tôt compris qu’il avait du charme et il avait immédiatement su le dompter. Comme par magie, sans user du moindre baratin, il pouvait faire craquer n’importe quelle fille. Je le regardais collectionner les conquêtes pendant que moi, j’étais comme transparent à ses côtés. Mais cela ne m’affectait pas, je ne l’enviais même pas. Et pourtant, c’est une femme qui nous avait séparés.
Richard me tira de mes pensées.
- Aller Greg, arrête de faire le con, lança-t-il avant de marquer un arrêt. Prends le temps de réfléchir, de toute façon, il faut laisser Alan se remettre de ses émotions avant de lui sauter sur le poil. Il ne faut pas le brusquer et… Mon éclat de rire le stoppa net.
- Bon sang tu es une vraie tête de mule, lançai-je en riant.
- Oui, parfaitement Monsieur, une tête de mule, dit-il sans une once de plaisanterie dans la voix. Je peux même être une vraie tête de con parfois. Que les choses soient claires : soit tu me finis cette satanée biographie, soit tu te cherches un autre éditeur, compris ? Et je ne pense pas qu’avec les ventes de ton dernier livre, la tâche soit gagnée d’avance.
Il finit son verre d’une traite et se leva en me lançant un regard noir. Je ne l’avais jamais vu comme ça.
Décidément, je n’avais pas le vent en poupe aujourd’hui. Les dés étaient jetés, je savais que Richard ne reviendrait pas sur sa décision.
Je décidai de rentrer à pied pour réfléchir avant de regagner l’appartement qui me semblait si vide sans Laure. Elle rentrait demain. J’avais hâte de la serrer dans mes bras. Je lui téléphonai sur le chemin pour l’embrasser avant qu’elle ne se couche.
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MessageSujet: Re: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMer 25 Jan 2012 - 20:31

Chapitre 3 :


Le réveil marquait 1h30 du matin. J’avais marché une bonne heure après avoir quitté Richard pour essayer de me vider la tête mais je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Nous étions fin mai, les nuits étaient de plus en plus chaudes. Allongé sur mon lit, je scrutais le plafond en me repassant les événements de la journée. On aurait dit que le monde s’était mis d’accord pour me pousser à m’immiscer dans l’histoire de Marie et à replonger dans ce qui me faisait si peur.
Je savais pourtant que Richard avait raison, qu’il ne fallait pas que j’abandonne mon projet alors que j’étais si près du but, et Sam, qui me connaissait si bien avait su éveiller ma curiosité. Pourtant, rien que d’imaginer ce que cela impliquait, je sentis une angoisse incontrôlable monter en moi, une peur indéfinissable que j’essayai de chasser mais qui revenait si vite qu’elle paralysait mes pensées et me glaçait le sang.
Pourquoi étais-je si effrayé à l’idée de devoir enquêter sur la mort de Marie ? Je croyais pourtant avoir digéré le passé. Je ne pensais pas que la perspective d’y revenir me serait si douloureuse.
Sam n’avait jamais approuvé que je renonce à ma carrière. Depuis mes débuts, il m’avait toujours poussé à aller de l’avant, à me dépasser. Il m’avait aidé à faire mes premiers pas, puis j’avais vite gagné confiance en moi et pris mon envol. Au bout de quelques années sur le terrain, je me sentais invincible, je voulais déplacer des montagnes et aller vite, trop vite, comme un enfant qui ne sait pas qu’il peut tomber et se faire mal. J’avais commis des erreurs et la chute avait été brutale. Je crois d’ailleurs que je ne m’en suis pas encore vraiment relevé.
Cela faisait sept ans que j’étais dans la police lorsqu’on m’avait mis sur l’affaire Morin. C’était le Commissaire Marionni qui dirigeait l’enquête. J’avais alors trente-et-un ans, j’étais encore jeune et fougueux, j’avais envie de gravir les échelons. Je vivais avec Caroline depuis deux ans. Nous étions inséparables et vivions une relation passionnelle. Caro était étudiante, c’était une fille pétillante, dynamique, un peu fofolle même. Je l’aimais profondément. Elle adorait l’imprévu, je me régalais à lui organiser des week-ends surprise à la campagne, elle sautait de joie comme une enfant quand je venais l’attendre à la sortie de la fac et qu’elle découvrait nos valises chargées dans le coffre. Nous passions le week-end à nous balader main dans la main, et le soir, nous faisions des projets, enroulés dans notre duvet sous la tente. Elle admirait mon métier et ses yeux pétillaient quand je lui racontais mes journées.
Les médias avaient beaucoup parlé de l’affaire Morin : Catherine Morin, une jeune femme de trente-deux ans avait été retrouvée égorgée dans son appartement. Son petit garçon de quatre ans l’avait trouvée dans une mare de sang un matin en se levant et c’est lui qui avait alerté les secours. La population avait été marquée par l’horreur de la scène.
Catherine Morin vivait dans un quartier lugubre, elle était séparée de son mari depuis quelques mois et ce dernier avait eu du mal à encaisser la rupture. Il la harcelait au téléphone et selon sa famille, elle en avait même peur. Du coup, Marionni l’avait immédiatement fait mettre en garde à vue. Il voulait faire du zèle et boucler l’enquête en quelques jours pour voir son nom en première page des journaux. Il avait présenté le dossier de telle façon que le juge d’instruction avait fait incarcérer Morin sur le champ.
Dans le même immeuble que Catherine, vivait une bande de jeunes connus par la brigade des stupéfiants. Nous les avions interrogés mais ils avaient nié connaître Catherine. Persuadé que l’ex-mari était innocent et que les jeunes étaient impliqués dans l’affaire, j’en avais parlé à Marionni qui avait refusé catégoriquement de mettre en doute sa théorie. Je l’avais presque supplié de demander un mandat pour fouiller chez les jeunes et voir si on pouvait établir un lien avec Catherine mais il avait refusé. Il avait trop peur de passer pour un guignol si on découvrait quelque chose. Excédé par sa réaction, j’en avais parlé à Caro et inconscients, nous avions décidé de faire le guet devant l’appartement et d’y pénétrer lorsqu’il serait vide. A l’époque, Sam était cloué à son canapé suite à une fracture tibia-péroné. Je lui avais demandé son avis et il m’avait fortement déconseillé de faire cela. Je ne lui en avais plus reparlé, croyant que le maître avait dépassé l’élève et excité à l’idée de revenir le voir avec le brillant résultat de mes recherches. Plusieurs soirs de suite, nous avons donc attendu des heures dans la voiture avec Caro. Elle était fière et excitée de jouer les Sherlock Holmes et sa compagnie me donnait des ailes. Le troisième soir, la lumière s’est éteinte dans l’appartement des jeunes et nous avons vu les deux plus âgés de la bande sortir de l’immeuble et partir en voiture. Nous sommes alors montés et avons ouvert la porte à l’aide d’un passe-partout. Caro faisait le guet à la fenêtre pendant que je fouillais minutieusement les lieux. L’appartement était plongé dans une demi-obscurité. J’entendais Caro rire comme une petite fille en me chuchotant.
- J’ai peur mais qu’est-ce que c’est excitant !
De mon côté, j’étais plongé dans l’examen des tiroirs et armoires. Je n’ai pas réagi immédiatement lorsque la lumière s’est allumée mais tout est ensuite allé très vite. Deux jeunes se tenaient à la porte et nous hurlaient dessus. J’ai voulu sortir mon arme pour les calmer mais Caro a eu peur et a voulu se réfugier vers moi. Je lui ai crié de ne pas bouger mais le grand brun avait sorti un flingue et tiré avant même que je comprenne ce qui se passait. Je me souviens encore du bruit sourd des coups de feu et du regard implorant de Caroline au moment où elle s’effondrait. Vint ensuite la douleur dans mon genou, une douleur qui me fit vaciller et m’emporta dans un grand trou noir avant même que je puisse courir vers Caro.
Cela s’était passé il y a sept ans et depuis, je m’étais repassé cette scène des millions de fois. Chaque fois, je frissonnais à l’idée que j’aurais pu faire quelque chose, que cela aurait pu se terminer autrement.
J’avais passé un mois à l’hôpital pour mon genou puis j’avais été suivi pendant plus d’un an par un psy, en hôpital de jour, à raison de deux séances par semaine. J’y ai appris à dompter la culpabilité et la colère, à faire avec. A ne pas me détruire moi-même en ressassant mes erreurs.
Je m’étais évidement fait virer de la police et l’ex-mari de Catherine Morin avait été inculpé malgré le manque de preuves. J’avais témoigné au procès du jeune qui avait tiré sur Caro. Je me sentais aussi responsable que lui et je m’imaginais à ses côtés sur le banc des accusés.
Il commençait à se faire tard, je sombrais peu à peu dans le sommeil, le visage de Caro flottait au-dessus de moi.
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MessageSujet: Re: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMer 25 Jan 2012 - 20:31

Chapitre 4 :

Il était à peine 7h. J’avais mal dormi : un sommeil entrecoupé qui n’avait pas chassé les pensées douloureuses de la veille.
Il fallait que je m’occupe. Laure revenait ce matin, je devais aller la chercher à l’aéroport à 11h20 et je ne voulais pas passer quatre heures de plus à me battre contre mes idées parasites.
J’enfilai mon jean, fis réchauffer une tasse de café puis vins m’asseoir en tailleur derrière mon ordinateur posé sur la table basse. J’avais comme une boule au ventre mais au lieu de fuir ce qui m’effrayait, j’avais décidé de regarder les choses en face. Je voulais reprendre les notes prises au cours de mes séances de travail avec Alan et essayer de lire entre les lignes. Cela ne m’engageait à rien après tout.
En me replongeant dans mon projet, l’angoisse diminua peu à peu. J’avais commencé à écrire après la mort de Caro, alors que j’étais loin de penser avoir un don pour cela ni même pouvoir y prendre du plaisir. Au cours de mes séances de psychothérapie, j’avais du mal à sortir ce qu’il y avait en moi, à mettre des mots sur mon malaise. Mon thérapeute m’avait alors demandé de noter les idées qui me passaient par la tête, comme ça, sans les analyser, juste pour coucher sur du papier ce qui me traversait l’esprit. Cela me semblait difficile au début, il m’avait fallu être attentif à moi-même, me concentrer sur mes impressions. Cela paraît bête à première vue mais c’est en fait une véritable gymnastique. Puis cet exercice était devenu spontané, j’avais su capter des instants pour en faire des mots. J’avais ainsi réussi à mieux me connaître. Des mots, j’étais passé aux phrases puis cela était venu instinctivement, je notais des choses, souvent banales, parfois douloureuses et j’arrivais ainsi à me libérer, à dompter tout ce qui vacillait dans ma tête. Petit à petit, le plaisir était arrivé. Je m’étais alors ouvert vers l’extérieur et j’avais arrêté de décrire mes états d’âmes pour m’intéresser au monde qui m’entourait.
J’aimais m’assoir dans un parc et observer les gens. J’essayais de m’imaginer, au travers de leur attitude, quelle pouvait être leur quotidien, leur passé, leurs vieux démons et certains d’entre eux m’évoquaient des choses passionnantes. C’est comme ça qu’était née la trame de mon premier roman, en observant un homme qui lisait son journal en regardant sa montre. De son attitude nerveuse, j’avais créé une histoire, fruit de mon imagination et j’y avais collé des sentiments : certains tirés de mon expérience personnelle, mais la plupart imaginés ou devinés dans l’expression d’un regard.
J’avais ensuite démarché les éditeurs. Cela avait été dur et j’avais failli baisser les bras à plusieurs reprises, puis j’avais rencontré Richard qui m’avait aidé et la publication de mon premier ouvrage avait suivi quelques mois plus tard. J’en avais été très fier et les ventes avaient été encourageantes.
Après plus d’une heure à relire mon travail, je n’avais rien trouvé qui puisse corroborer la thèse de Sam. Pour moi, cela ne tenait pas debout. Qui aurait pu vouloir tuer Marie ? Je la connaissais à peine, c’est vrai, mais elle paraissait si gentille. Son teint clair et ses longs cheveux blonds lui donnaient un air doux. Avocate, elle avait ouvert son propre cabinet à vingt-neuf ans et avait très bonne réputation. Il est vrai que sur le plan professionnel, on la disait assez dure mais c’était nécessaire dans ce métier et j’imaginais mal un ancien tolar venu se venger après une inculpation.
Alan l’avait rencontrée il y a six ans. Il était venu la consulter après avoir porté plainte contre un magazine à sensation qui avait publié un article outrageux sur lui. Ils avaient immédiatement accroché et tout était allé très vite. Les rendez-vous professionnels s’étaient transformés en dîners romantiques et ils s’étaient mariés un an plus tard alors que Marie était enceinte de leur petite fille, Nina, qui a maintenant presque cinq ans. J’avais à l’époque appris la nouvelle par les journaux. Leur union avait fait couler de l’encre. J’étais surpris de voir Alan s’engager, lui qui aimait être libre comme l’air. De plus, Marie n’était pas son genre de femme. Certes, elle était très jolie mais j’avais du mal à croire que son fauteuil roulant n’ait pas repoussé Alan et sa fierté. J’avais pensé qu’il voulait changer son image de séducteur et se faire ainsi un coup de pub. Mais au cours de nos séances de travail, je me suis rendu compte qu’Alan aimait vraiment Marie. Je l’ai compris dès que je les avais vus ensemble. Pour la première fois, il était sincère. Bien sûr, il s’absentait souvent de la maison pour des tournages mais on sentait que Marie et Nina prenaient une place très importante dans sa vie.
Marie était en fauteuil roulant depuis l’âge de onze ans. Elle vivait dans un petit village. Casse-cou, elle inventait toujours des jeux dangereux pour braver les interdits. Ce qu’elle préférait était de grimper sur le toit des voisins auquel elle avait accès par la fenêtre de sa chambre. Sa mère la retrouvait fréquemment en train de jouer les acrobates malgré les blâmes et les punitions répétées. Un jour, Marie avait une fois de plus désobéi à sa mère pour escalader sa fenêtre et atteindre sa cachette favorite : mais ce jour-là, il avait plu toute la nuit et le toit était glissant, son pied avait dérapé et elle avait fait une chute de six mètres. Elle était restée des mois hospitalisée et les médecins avaient été formels ; elle ne retrouverait jamais l’usage de ses jambes.
Marie ne parlait jamais de son handicap. Nous avions été invités à dîner un soir avec Laure et j’avais été impressionné par la force de caractère de la jeune femme. Elle semblait épanouie, agissant comme si de rien n’était et ne faisant aucune allusion à sa différence. On oubliait même par moment qu’elle était en fauteuil. Pourtant, Laure ne partageait pas du tout mon point de vue. Elle avait beaucoup apprécié Marie mais la déformation professionnelle la poussait à voir la jeune femme sous un autre angle que le mien. Nous en avions discuté longuement sur le trajet du retour. La façon dont Laure lisait à travers les gens me déconcertait toujours.
- Elle semble forte, m’avait-t-elle dit, mais ce n’est qu’une façade. On voit bien qu’elle refuse complètement son handicap. Malheureusement, le fait de ne pas en parler et de garder cela pour elle la ronge intérieurement. Elle m’a fait de la peine car je sens qu’au fond d’elle, derrière ce sourire, elle souffre énormément. Je ne la connais pas suffisamment pour lui dire mais je pense qu’elle a besoin de se faire aider, de voir quelqu’un pour évacuer tout cela.
Au cours de nos rendez-vous, Alan me parlait souvent de Marie sans toutefois s’étaler sur leur couple. Ils travaillaient tous les deux beaucoup et profitaient peu de leur vie de famille mais cela lui convenait ainsi. Il aimait vivre à cent à l’heure et ils semblaient heureux. Pourtant, j’avais un soir croisé Marie, elle avait les yeux rouges et avait baissé la tête pour que je ne voie pas qu’elle avait pleuré. Suite à ce que Laure m’avait dit, j’avais donc essayé d’en parler à Alan qui n’avait semble-t-il pas apprécié que je me mêle de cela.
- Ne t’inquiète pas, avait-il répliqué un peu agacé. Marie est forte. Ce n’est pas toujours facile et elle a parfois des coups de blues, des périodes un peu difficiles mais rassure-toi, elle rebondit vite.
Je n’avais donc pas poussé plus loin la conversation de peur de le braquer.
A bien y réfléchir, je ne voyais pas pourquoi Sam cherchait à compliquer cette affaire. Pourtant, je le connaissais bien et son instinct le trompait rarement.
Il était presque 9h, je n’avais pas appris grand-chose de plus en relisant mes notes : Alan parlait surtout de sa carrière professionnelle et ne rentrait pas souvent dans des détails personnels. Je décidai de passer voir Alan avant de me rendre à l’aéroport. Je n’avais pas osé l’appeler depuis le drame, cela faisait déjà trois semaines et je ne savais pas comment l’aborder. Sans trop réfléchir, je pris mes clés et mon téléphone portable et fonçai dans l’escalier. Dehors, l’air était doux et je me sentais décalé avec cette belle journée ensoleillée. Mes pensées s’emmêlaient et j’étais dans le même état qu’avant un examen. Sur le trajet, je faillis faire demi-tour. Je ne savais pas dans quelle optique j’allais trouver Alan, ni ce que j’allais lui dire. J’avais le code qui permettait d’accéder au parking de son immeuble, cela m’amusait toujours de voir ma vieille guimbarde garée à côté des grosses berlines.
Je pris l’ascenseur et réalisant que j’aurais sans doute dû appeler avant de venir. J’étais là, je ne devais plus faire marche arrière.
Je sonnai et l’attente derrière cette porte me parût interminable. Amélie vint ouvrir. Elle était magnifique comme toujours, brune aux cheveux longs ondulés, elle était pétillante et fraîche. Elle devait avoir à peine vingt-cinq ans. C’était la baby-sitter de Nina, elle vivait chez les Moss pour s’occuper de la fillette, faire le ménage et les repas. Je la croisais à chacune de mes visites mais nous n’échangions que quelques mots.
- Mr Miller, je ne m’attendais pas à vous voir, dit-elle.
- Oui, répondis-je un peu gêné, je ne sais pas si ma venue est une bonne idée, je voulais savoir comment allait Alan.
- Pas très bien, il tourne en rond et rumine mais vous avez bien fait de passer, ça lui fait du bien de voir du monde. Je vais lui dire que vous êtes là.
- Ce n’est pas la peine Amélie, je suis là lança Alan. Viens Greg, entre.
Je vis Alan apparaître dans le couloir derrière Amélie. Il me fit signe d’entrer et je le suivis jusqu’au salon. Il avait les traits tirés et le regard vide. Nous n’avons pas échangé un mot pendant quelques secondes et cela me sembla une éternité. Alan paraissait perdu dans ses pensées et je ne savais pas quoi lui dire, les mots me manquaient.
Je finis par rompre le silence :
- Comment vas-tu Alan ? dis-je calmement.
Il regardait par terre et respira un grand coup avant de répondre.
- C’est dur, très dur.
Alan était un bon acteur et il en jouait souvent au quotidien, mais cette fois, on sentait que sa souffrance était réelle. J’avais honte d’être venu, je voulais le questionner mais je me rendais compte que tout cela était malsain et je maudis Sam et Richard de m’avoir embarqué là-dedans. Alan repris d’une voix à peine audible.
- Je n’ai pas été assez à l’écoute, pas assez présent, elle était malheureuse et je ne l’ai même pas vu.
- Tu ne pouvais pas savoir qu’elle en arriverait là Alan, ne culpabilise pas.
- Je n’ai pas été assez à l’écoute, répéta-t-il, elle traversait des périodes difficiles, je n’ai pas su la soutenir, j’ai toujours minimisé.
- Arrête voyons, ça ne sert à rien, tu ne pouvais pas l’aider tout seul, il aurait fallu qu’elle consulte un psychiatre pour arriver à accepter son handicap.
- Non Greg, il y avait autre chose.
- Comment cela autre chose ?
- Bien sûr, sa paralysie la minait parfois, ce n’était pas toujours facile à vivre pour elle mais je ne crois pas que ce soit cela.
Il marqua un long temps d’arrêt.
- Nous essayions d’avoir un autre enfant depuis trois ans et nous n’y arrivions pas. Cela était très important pour Marie alors que moi, je trouvais que nous étions heureux tous les trois. Elle voulait que je l’accompagne chez un spécialiste pour tenter une insémination artificielle mais je n’étais pas très chaud et nous avons dû annuler plusieurs rendez-vous car je n’étais jamais disponible. Elle m’en parlait souvent et j’avoue que je n’ai pas été très compréhensif. Je ne comprenais pas qu’elle ne renonce pas tout simplement, nous avions déjà une petite fille et nous étions heureux comme cela. Avec nos emploi-du-temps respectifs, élever un autre enfant aurait été compliqué. Nous nous disputions souvent à ce sujet et elle n’allait pas très bien depuis quelques semaines, cela la minait vraiment. En plus j’étais souvent loin pour des tournages et on ne faisait que se croiser depuis quelques temps.
Je ne savais pas quoi répondre à son désespoir, j’avais peur d’être maladroit, j’étais déjà passé par là et je savais que les mots pouvaient difficilement apaiser la douleur, qu’ils l’attisaient même parfois.
Les rôles étaient en quelque sorte inversés cette fois. J’avais souvent imaginé une scène de ce genre, mais cet instant loin d’être jouissif, me torturait intérieurement.
La belle amitié qui nous unissait Alan et moi depuis notre enfance avait pris fin un soir d’hiver. J’avais vingt-cinq ans, j’étais sur le point d’épouser Diane que j’avais rencontrée quatre ans plus tôt. Alan commençait alors à se faire connaître au cinéma. Diane et moi étions heureux, nous vivions ensemble depuis trois ans : nous sortions beaucoup, nous étions toute une bande, Alan nous faisait entrer dans des boites branchées et nous profitions bien de la vie. Le mariage devait avoir lieu quatre mois plus tard mais Diane traînait pour envoyer les faire-part et finir les derniers préparatifs. Pour cause, elle avait fini par m’avouer qu’elle avait quelqu’un d’autre dans sa vie et que ce mariage était une erreur. Cette annonce m’avait anéanti. Elle avait fait ses valises et était retournée vivre chez ses parents.
Perdu, j’étais allé voir Alan le soir même pour parler mais arrivé à son appartement, j’avais vu la voiture de Diane garée devant chez lui. Je m’étais alors approché de la fenêtre et je les avais vus enlacés sur le canapé. J’ai alors cru que ma tête allait exploser et j’ai donné un coup de poing dans la vitre qui a volée en morceaux en m’entaillant une partie du bras. Alan a tourné la tête et nos regards se sont croisés. Je me suis mis à courir, des larmes plein les yeux. Alan était sorti et me criait de revenir mais je n’entendais plus rien. J’ai passé une partie de la soirée aux urgences pour me faire recoudre. Alan a pendant longtemps essayé de reprendre contact mais je n’ai jamais répondu à ses appels, je voulais l’effacer de ma vie. Diane m’a envoyé une lettre quand Alan l’a plaquée un mois plus tard, mais je l’ai déchirée avant d’être arrivé au bout.
Je n’avais pas revu Alan depuis et j’avais gardé tout cela au fond de moi jusqu’à ce que je rencontre Laure. Psychiatre, elle avait tout de suite vu que cette vieille cicatrice n’était pas refermée. Elle m’avait conseillé de reprendre contact avec lui pour parler de tout cela et passer à autre chose. L’an dernier, mes bouquins ne marchant plus vraiment, Richard menaçait de mettre un terme à notre contrat si je ne trouvais pas un thème accrocheur.
J’avais toujours voulu écrire une biographie et Laure m’avait suggéré de contacter Alan. J’y avais longuement réfléchi et j’avais fini par le faire, soutenu par Laure qui était à la fois ma compagne et mon coach quand il le fallait.
Les premiers contacts avec Alan avaient été difficiles. Je le sentais mal à l’aise et de mon côté, je ne pouvais m’empêcher de le détester un peu. Nous n’avions jamais encore réussi à en parler, nous avions sans doute peur tous les deux de remuer ces tensions endormies.
Alan me tira de mes pensées en posant sa main sur mon épaule.
- J’aimerais que l’on reprenne notre travail Greg, me dit-il. Si tu le veux bien, j’aimerais que cette biographie reflète l’histoire que j’ai vécue avec Marie. Après tout, elle faisait partie de ma vie, bien plus que ma carrière. J’ai besoin de revivre ces moments et je sais que tu sauras les restituer.
- Tu es sûr que c’est ce que tu veux ?
- Je ne suis pas sûr de vouloir les faire partager au grand public mais…
- Ecoute Alan, rien n’est obligatoire, on peut essayer et si tu veux que cela reste à toi, on s’arrangera.
Alan leva les yeux vers moi.
- Merci Greg, merci.

Une fois dans ma voiture, je téléphonai à Sam. Après avoir composé un faux numéro, j’entendis sa voix rauque. Il avait sans doute besoin d’un peu de piment dans sa carrière mais il allait devoir chercher ailleurs car il y avait à priori peu de chances que l’affaire Moss soit l’enquête de sa vie.
- Salut Greg, dit-il d’une voix essoufflée.
- Salut, je sors de chez Alan.
- Ah mon lascar, ça ne m’étonne pas de toi, je te connais, lança-t-il en riant.
- Oui, mais calme-toi gars tu fais fausse route. Marie n’allait pas bien depuis quelques temps. Elle essayait d’avoir un autre gamin mais le moule était semble-t-il cassé et elle avait beaucoup de mal à l’accepter. Elle devait avoir l’impression que le destin s’acharnait.
- Greg, je sors de chez son médecin, dit-il avant de marquer un temps d’arrêt. Marie était enceinte.

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Charlie76
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MessageSujet: Re: Le mystère de la falaise - par Charlie 76    Le mystère de la falaise - par Charlie 76  Icon_minitimeMar 31 Jan 2012 - 22:47

Je me permet de mettre le lien, si quelqu'un est interessé par la suite !

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